Texte de Michel Nuridsany
EXTRAIT VIDEO
"Ma présence à l'image, dit Sandy Amerio,
n'est pas l'objet essentiel de mes films. Il
s'agit pour moi d'articuler mon histoire
personnelle avec ce qui nous concerne
tous."
Oui :
et de relativiser le témoignage. La
douteuse objectivité du "reporter'' n'est pas
revendiquée pour ce voyage en
Roumanie effectué par Sandy Amerio et
Alexis Davy. C'est là une méditation à la
première personne du singulier, plus
politique qu'il n'y paraît. Et très subtile. Nulle
coquetterie dans ces apparitions, ces
annonces, ces commentaires, mais une
façon de s'inclure dans ce qu'on montre,
de se situer comme partie prenante avec
l'honnêteté d'un Raymond Depardon.
Jusqu'à dire au début du film : "Nous
n'avons toujours pas d'amis. Ça fait deux
semaines que nous sommes arrivés et on
nous avait dit que les Roumains adoraient
les Français…"
Est-ce alors un film "par défaut" ?
Non, mais lacunaire certainement.
En fait, le film sous sa forme actuelle, est
né de la difficulté à rendre compte de
l'expérience vécue. À l'origine, des
bateaux à quai, à Nantes, et des
roumains dans ces bateaux, la rencontre
d'un réfugié politique qui leur
recommande des amis "très influents", "de
l'intelligentsia" qui s'occuperaient d'eux en
Roumanie.
Or, là-bas, ces personnes, vont les
manipuler. On entend même, clairement,
l'un d'eux dire en aparté : "ils vont tout
gober''.
C'est donc au montage que le film va
trouver sa vérité, à travers la relecture
de l'expérience vécue avec gêne ici ou
avec un certain bonheur là, lorsque
apparaît un groupe de tziganes à qui la
caméra sera même prêtée.
À travers les doutes, les interrogations,
les adresses à la caméra, les évocations
de ce qui n'est pas montré, à travers les
images et les sons volés en faisant l'idiote,
Sandy Amerio et son complice Alexis
Davy,
nous proposent une réalité beaucoup plus
complexe qu'un simple compte-rendu
aurait pu le faire.
"L'attaque frontale n'est pas, me semble-t-il,
forcément efficace, dit Sandy Amerio.
Parfois le détour permet de mieux cerner
le problème."
Texte de Michel Nuridsany publié dans le catalogue C'est pas du Cinéma!